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mise à jour :

3/4/2004

 

Mon Maître...

L'une des raisons pour lesquelles l'oeuvre de Tolkien est l'une de mes références premières, en dehors de l'attrait évident des romans, c'est l'allusion permanente à des temps modernes et à un monde plus ancien, celui des elfes, des nains et bien entendu... des dragons. (cf. Bilbo le Hobbit)

Le Silmarillon, en particulier, de par sa forme (quelle langue !) m'a parlé, si j'ose dire. Bâti sur l'évocation de mythologies "elfiques" et autres, sans concession pour les canons littéraires habituels, il m'aurait touchée en plein coeur si cette expression n'était pas tout simplement idiote. Il ne m'a pas touchée en plein coeur, il m'a rappelée vers des origines inconnues et profondément enfouies dans ma mémoire, dans ma culture, dans cet inconscient collectif qui devrait cesser d'être nié ou détourné... Non pas que je prétende que ce qui est raconté dans ces textes soit arrivé ou ait existé dans notre passé le plus archaïque, mais qu'il existe pour moi, dans la réalité que je me suis choisie, parce que poétiquement et "imaginairement" mienne.

Réputé (et abondamment critiqué avant d'être "encensé" par ceux-là même qui souvent ne l'ont pas lu mais qui trouvent de bon ton d'évoquer ce titre aux si puissantes consonnances ...) pour être d'un abord plus difficile que Le Seigneur des Anneaux, Le Silmarillon est sans doute le texte que je préfère dans l'oeuvre de Tolkien. Je pense, pour conclure, qu'il n'était pas destiné à autre chose que d'émouvoir ceux qui se retrouvent en lui, et qu'à partir du moment où l'on peine pour y pénétrer il faut y renoncer. J'ai bien du mal à lire du Asimov, moi !

Je laisse la parole au Maître:

"J'ai moi-même des doutes au sujet de l'entreprise (d'écrire Le Silmarillon). Une partie de l'attraction du Seigneur des Anneaux est, je pense, due aux aperçus d'une histoire plus large à l'arrière-plan; une attraction comme celle d'observer au loin une île que ne visite pas, ou de voir les tours d'une cité lointaine miroitant dans une brume ensoleillée. Y aller serait détruire la magie, à moins que de nouvelles perspectives inaccessibles ne soient ensuite révélées" (J.R.R. TOLKIEN, Lettre, 20/09/1963)

"Une histoire doit être racontée ou bien il n'y aura pas d'histoire, pourtant ce sont les histoires qui ne sont pas racontées qui sont les plus émouvantes. Je pense que tu es ému par Celebrimbor parce qu'il transmet un sentiment subit d'histoires sans fin jamais racontées: des montagnes vues au loin, que l'on n'escaladera jamais, des arbres lointains (comme celui de Niggle) dont on ne s'approchera pas - ou si on le fait, qui deviendront simplement des "arbres proches"..." (J.R.R. TOLKIEN, Lettre, 1945)

 

Plutôt que de créer un énième site sur Tolkien, je vous renvoie à ceux que j'ai visités et qui, si souvent, sont riches et fort bien conçus. Bon voyage dans les Terres du Milieu, et, surtout, ne vous dispensez pas de LIRE, et RELIRE encore ces oeuvres majeures !

 

 
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Fond d'images (divers)

ARCHIVES "TOLKIEN" de HAMBOURG

Ardalambion: les langues elfiques

 

ARDA & LA TERRE DU MILIEU

Cet article  a été partiellement publié dans la revue "FAERIES" n°1 (printemps 2000) aux éditions Nestiveqnen

les notes sont en cours, elles seront disponibles dans les semaines à venir

 

(un essai sur la géographie dans l'oeuvre de J.R.R. Tolkien)

merci à Guibod, Didier Willis, Gilles Chagnon et à la liste Eb-Tolkien pour leurs conseils

"Ceux des Ainur qui le voulurent se levèrent et entrèrent dans le Monde au commencement des temps, et ce fut leur tâche que de l'achever et leur travail que d'accomplir la vision qu'ils avaient entrevue. Ils oeuvrèrent longtemps dans les espaces d'Ea, qui sont plus vastes que ne peuvent le concevoir les Elfes ou les Humains, jusqu'à ce qu'au moment assigné fût créé Arda, le Royaume de la terre. Puis ils prirent la vêture de ce monde et y descendirent et depuis lors y demeurent. " (Le Silmarillon, "Valanquenta", p16)

 

 

 

PLAN:

I- repères geographiques (Arda-Aman-la Terre du Milieu)

II- les mondes perdus de tolkien: des terres imaginaires nees d'une angleterre archaique (l'Angleterre et la Scandinavie- l'Europe et l'Afrique du nord-ce qu'en dit Tolkien)

III- les 3 visions du mythe du monde perdu chez Tolkien (Tol Eressea - Valinor - Nùmenor)

 

 

-I- REPERES GEOGRAPHIQUES

 

a- Arda: 

"Ea !"("Que cela soit") murmura Illuvatar lors de la conception du monde. C' est l'univers matériel, le monde, le socle géographique de l'univers de Tolkien. Arda, ou "La Terre", est la terre originelle, conçue et désignée par Illuvatar pour être la demeure de ses Enfants. Elle fut façonnée symétrique et tempérée, une sorte de paradis originel comme l'imagine la Chrétienté, mais la malice de Melkor et la guerre qui opposa ce dernier aux Valar nuancèrent sérieusement cet aspect premier: A l'origine, comme on peut le voir sur la carte 1, Arda était plate et ronde, encerclée par Ekkaïa, la "mer extérieure" à son tour ceinte par les Murs de la Nuit. Il y avait deux continents, immenses: Aman, et la Terre du Milieu, séparés par Belegaër, "La Grande Mer" (ou encore "La Mer de l'Ouest", "La Grande Eau"). Sous Arda se trouvait (ou se trouverait ?) un rocher monumental, percé de grottes, dont on ne sait pas s'il reposait lui-même sur quelque chose. Ce sont les Abysses. Surplombant le tout, le "Voile d'Arda": l'atmosphère. Au-delà encore, Ilmèn, une région (définie comme telle) se trouvant au-dessus des airs, la résidence des étoiles.

Taniquetil était la plus haute montagne d'Arda, au sommet de laquelle habitaient les Illmarin, Manw' et Varda. On l'appelle aussi "La Montagne Blanche" ou "La Montagne Bénie".

Lors du Changement du Monde, occasionné par la guerre évoquée ci-dessus, Illuvatar arracha littéralement Aman d'Arda, et fit de cette dernière le monde sphérique sur lequel nous habitons. Les légendes disent qu'elle retrouvera sa forme première (et donc son essence originelle) à la Fin des Temps.

La Grande Mer de l'Ouest, le Belegaër, séparait donc Aman de la Terre du Milieu. Elle s'étendait depuis Helcarax', au Nord, jusqu'au Sud le plus extrême d'Arda, qui n'est répertorié sur aucune carte. Les principales îles de Belegaër étaient Balar, Nùmenor, les îles Enchantées, et Tol Eressea.

b- Nùmenor :

"l'Occidentale" (son nom entier en langue elfique quenya est "Némenor'") était une grande île qui avait été conçue par les Valar pour que les Edain s'y installent à la fin du Premier Age. Ses habitants, les Nùmenoréens, étaient humains, et portaient aussi le nom de Dunedains. Lorsque ces derniers tentèrent d'investir de force Valinor et Eressea (terres elfiques), une guerre terrible s'engagea qui s'acheva par la destruction totale de Nùmenor, et la séparation d'Aman et de Tol Eressea du monde matériel. Nùmenor tient donc une place bien particulière dans cet essai sur les Mondes Perdus, et il en sera largement question par la suite. On lui connaît de nombreux noms, dont : Anadén', Andor, Elenna, ou le Pays de l'Etoile. Après sa submersion, on la retrouve sous les noms d'Akallabêth, Atalante ou Mar-nu-Falmar.

c- Aman:

Le vaste continent occidental qui s'étendait entre la mer Belegaër et la mer Ekkaia lorsqu'il appartenait encore à Arda et au monde matériel n'est connu que par les légendes, et comme l'île d'Avalon, sa réalité et sa géographie sont incertaines. L'île, immense, était découpée par une colossale chaîne montagneuse en forme de croissant, les Pelori, partant de l'Est depuis Ekkaia pour former la frontière du royaume de Valinor au Nord, à l'Est et au sud. Une seule brèche existait dans cette barrière monumentale: le grand ravin Calacirya, "la fissure de lumière", ainsi appelée car la lumière des Deux Arbres sacrés de Valinor pouvait y passer pour aller illuminer Eldamar. Après l'empoisonnement des Arbres, les Valar fortifièrent la passe et la rendirent infranchissable. Tirion, la principale cité d'Eldamar, se trouvait dans la région de Calacirya sur la colline de Tùna. Tirion avait des murs d'une blancheur éclatante, et des escaliers de cristal. Sa plus haute tour, Mindon Elaliéva, se trouvait au pied de l'Arbre Blanc des Eldar, Galathilion, identique à l'un des deux arbres de Valinor, Telperion le Blanc, mais ne produisant aucune lumière.

Valinor, le pays des Elfes Valar qui porte aussi le nom de Çla Plaine Fortifiée", se situait au-delà des montagnes Pelori, au centre d'Aman, légèrement à l'ouest. Eldamar commençait à l'ouest de la grande courbe formée par les Pelori près du ravin Calacirya, alors qu'au Nord s'étendait le Désert d'Araman, et au sud le Désert d'Avathar. Aman, comme Tol Eressea, fut arrachée d'Arda lorsque celle-ci devint ronde après la destruction de Nùmenor .

d- La Terre du Milieu: 

Ce sont les "Grandes Terres " qui se trouvent à l'Est de la Grande Mer (Belegaër), après qu'Illuvatar ait déraciné Aman et Tol Eressea d'Arda après avoir fait une sphère de celle-ci. Cette appellation a cours jusqu'aux années 1930 dans les manuscrits de Tolkien, puisque jusqu'à cette date le terme de "Terre du Milieu" n'est jamais utilisé par l'auteur. "Les grandes Terres" sont couramment employées dans " Les Contes Perdus ", mais il faut signaler qu'il s'agit de la correction de "Terres Extérieures" employé jusque là dans ses carnets. Ce continent est géographiquement le sol où se déroulent la plupart des événements relatés par Tolkien. Pour résumer, on dira que du point de vue des personnages du Seigneur des Anneaux, la Terre du Milieu est la terre historique et celle, bien réelle, sur laquelle ils vivent; et les autres terres évoquées, celles des légendes et des mythes par laquelle ils connaissent (ou imaginent) leur histoire.

(c) John HOWE

On ne peut évoquer tous les lieux dont il est question dans l'oeuvre de Tolkien, se rapportant à la Terre du Milieu. Il existe des Atlas complets traitant du sujet (voir bibliographie), et la seule lecture de la trilogie du Seigneur des Anneaux suffit pour se rendre compte de l'immense travail créatif effectué par Tolkien. Cependant, il faut préciser qu'on ne connaît dans le détail (mais parfaitement) que le Nord-Ouest du continent, partie dans laquelle se déroule l'essentiel du (des) récit(s) (voir carte 3).

En voici quelques éléments...

Le Beleriand, aussi connu comme "Le Pays de Balar" ou "pays des Elfes", se composait à l'origine des territoires situés autour de l'embouchure du fleuve Sirion, face à l'île Balar. Par la suite, le Royaume de Beleriand s'étendit à toutes les terres partant des anciennes côtes du Nord-Ouest de la Terre du Milieu jusqu'à l'estuaire du fleuve Drengist, ainsi qu'à tout l'arrière-pays du Sud d'Hithlum, et à l'Est, jusqu'aux Montagnes Bleues. A l'origine, Beleriand était le pays des Elfes Sindar de Doriath, et des Falas, plus tard rejoints par les Laiquendi de Beleriand, les Noldor de Nargothrond, Himlad, les Beleriand de l'Est et les Edain. Peu à peu, le Beleriand fut envahi par les troupes de Morgoth, détruit lors de la Grande Bataille, à la fin du Premier Age, et englouti par la mer. Seul Ossirand (Lindon) survécut. 

Dor Daedeloth, au Nord, était le territoire de Morgoth: "le Pays de l'Ombre et de l'Horreur".

Au Nord-Est il y aurait une mer intérieure, Helcar, à l'emplacement où se serait trouvé autrefois la montagne portant la lampe d'Illuin. Le lac de Cuivénen est décrit comme étant une baie de cette mer, ce qui est assez étrange...

Cuivénen, ou "l'Eau de l'Eveil", était un lac de la Terre du Milieu dont la légende racontait que c'était là qu'étaient nés les premiers Elfes, découverts par Orom'. En tout cas, c'est de Cuivénen que partit la Grande Marche vers l'Ouest des Eldar (jusqu'à Tol Eressea qui fut alors arrachée à Arda et conduite hors du monde matériel: la Baie d'Eldamar serait l'emplacement originel de la terre d'Eressea, quand elle n'était pas encore une île.).

Eriador était un pays situé entre les Montagnes de l'Ombre et les Montagnes Bleues, au Nord. C'est là que se trouvait le pays des Hobbit, la Comté, mais aussi le Royaume d'Arnor. Au nord d'Eriador, il n'y avait qu'un vaste désert. C'est la limite septentrionale de la carte de la Terre du Milieu dont nous disposons grâce aux indications laissées par Tolkien. Au sud des Montagnes Bleues, brisées par le Golfe de la Lune (estuaire du fleuve Lune (Lhùn)), se trouvent les Havres Gris, à l'ouest desquels vivait paisiblement la Comté des Hobbit. Dans le nord d'Eriador subsiste une terre qui fut jadis un royaume à part entière, Arnor. A l'ouest de celui-ci, presque aux pieds des Monts Brumeux.

Plus au sud, toujours à l'ouest des Monts Brumeux, vivaient les Noldor, dans leur royaume Eregion, "le Pays du Houx". C'est là que furent forgés les Anneaux des Elfes, et c'est là que se trouvait la Mine de la Moria dans l'un des royaumes : Khazad-Dum, les grandes cavernes des Nains de la race de Durin dans les Montagnes de l'Ombre.

Rivendell, "la Profonde vallée dans la Faille", aussi appelée Imladris, était la demeure d'Elrond. Elle se trouvait près des Monts Brumeux.

A la même latitude qu'Eregion, mais de l'autre côté des Monts se trouvait la Lorién. Ce pays, terre des Elfes, était gouverné par Celeborn et Galadriel, qui lui avaient donné ce nom en souvenir de la Lorién de Valinor (c'était le nom des jardins et de la demeure du Valar Irmo, maître des visions et des rêves qui s'appelait lui-même Lorién.). Son autre nom est Lothlorien (l'utilisation du préfixe loth- (fleur en sindarin, langue des Elfes sindar) rappelant aussi les jardins perdus de Valinor).

Au Sud se trouvait Gondor, "le Pays de Pierre". C'était un royaume nùmenoréen qui avait été fondé par Isildur (ancêtre d'Aragorn) et Anàrion. La principale cité de Gondor était Minas Tirith. Au nord il y avait Rohan, le "Pays des Chevaux", une grande plaine herbeuse autrefois appelée Calnardhon. Gondor s'ouvrait sur la mer Belegaër par la Baie de Belfalas (aussi dite "de Bel"), qu'il partageait avec la terre d'Humbar.

A l'est des montagnes qui constituent les frontières orientales de Gondor commençaient les terres du mal: Mordor, le Royaume de Sauron, communément appelé "le Pays Noir", ou "le Pays de l'Ombre". Ephel Duath, "le Rempart d'Ombre", était la chaîne montagneuse qui séparait Gondor de Mordor. Au sud de la forêt de Mirkwood (au 3è Age) se trouvait Dol Guldur, "le Mont du Sorcier", forteresse du Nécromancien Sauron.

A l'Est de la Terre du Milieu s'étendait Hildorien, le pays qui avait vu naître les Premiers Hommes ("les nouveaux venus", "les Hildor").

Il y a (littérairement) une importante expansion géographique au cours des récit morcellés qui constituent les Contes Perdus (1916-1917) avant le Silmarillon (1937), allant s'élargissant depuis le centre pour repousser Beleriand vers (puis dans) l'Ouest, jusqu'à la submersion de Beleriand à la fin des Jours Anciens. Entre les deux recueils, de nombreuses années se sont écoulées, et les indications, tant géographiques qu'historiques fournies par l'auteur (ces textes semblent devoir constituer une sorte d'Histoire des terres du Milieu, assez proche du Livre Rouge écrit par Bilbo le Hobbit et signalé à plusieurs reprises dans le Seigneur des Anneaux).

Quoi qu'il en soit, tout est mouvant dans les relations de ces jours si anciens, de ces mondes perdus, disparus, oubliés. Plus qu'aucun autre, ils se veulent perdus, du moins pour nous autres, Humains.

-II- LES MONDES PERDUS DE TOLKIEN: DES TERRES IMAGINAIRES NEES D'UNE ANGLETERRE "SCANDINAVE" ARCHAIQUE ?

 Je vais aborder ici un aspect un peu hasardeux de la géographie de Tolkien. Consciente de la difficulté de la chose, je sais que beaucoup d'amateurs de JRRT sont sceptiques sur la théorie qui suit, mais on ne peut s'intéresser à la question des Mondes Perdus sans éveiller ce type de réaction, et je prends délibérément le parti d'affronter les remarques éventuelles de ceux qui oublieront que les Terres du Milieu sont imaginaires, donc imaginées, et de surcroît par un spécialiste des folklores anglo-saxons, scandinaves et autres. Il va de soi que lorsque je dirai "telle terre a pour origine telle autre", ou bien "Arda est une Angleterre archaïque", cela signifiera, pour les rationalistes égarés dans nos Mondes Perdus: "dans l'inspiration, dans l'idée initiale de l'auteur".

Cela étant dit, allons y.

a- Avec le Livre des Contes Perdus: l'Angleterre:

Les récits de Tolkien se situent presque toujours dans le Nord-Ouest de la Terre du Milieu, ce qui rend aisé un rapprochement géographique entre le Bélériand archaïque et l'Angleterre. C'est plus que tentant, comme je vais essayer de le démontrer plus loin, mais ça ne l'est véritablement que pour les écrits les plus anciens de Tolkien, ceux des années 1915-1920, principalement réunis dans "Le Livre des Contes Perdus ". Par la suite, dans le Silmarillon (années 1940), la plupart des références ont disparu, et le monde élaboré durant toute une vie a pris son envol, et son existence "séparée". En d'autres termes, le Beleriand ne peut être vu comme une Angleterre parallèle que dans le cadre très restreint des "Book of Lost Tales " originels.

"J'étais depuis longtemps chagriné par la pauvreté de mon propre pays bien-aimé: il ne possédait pas d'histoires propres (liées à sa propre langue et à son propre sol), pas de la qualité que je recherchais, et trouvais (comme ingrédient), dans les légendes d'autres pays. Il y en avait de grecques, et de celtes, et de romanes, d'allemandes, scandinaves et finlandaises (qui me touchèrent grandement); mais rien d'anglais, hormis des choses d'une qualité appauvrie de "légendes romancées" populaires"

Le marin Eriol, dans les Contes Perdus, parvient sur l'île elfique Tol Eressea au terme d'un long voyage vers l'Ouest, où lui sont racontées les légendes et les histoires d'Elfinesse, qu'il rapportera ensuite chez les hommes. Il semble que ce personnage ait un rôle plus important qu'il n'y paraît: dans l'un des innombrables carnets de Tolkien, intitulé " Histoire de la Vie d'Eriol ", ce personnage est mis en relation directe avec l'un des sujets favoris de l'auteur (en tant que professeur): l'invasion des îles britanniques par Hengest et Horsa au Vè siècle après JC. Tolkien a donné des cours sur ce sujet à l'Université d'Oxford, s'intéressant au conte Beowulf dans lequel apparaît Hengest. Il ressort de cette étude que le personnage d'Eriol aurait des origines britanniques et/ou scandinaves. Or, s'il a navigué depuis sa terre natale comme le récit le sous-entend, et qu'il vient bien d'Angleterre, l'île sur laquelle sont partis les elfes, Tol Eressea, qui s'est littéralement arrachée au monde ancien, cela donne un sens plus qu'intéressant bien que contesté à la géographie de Tolkien: l'Angleterre et les îles britanniques des Jours très Anciens où l'Homme n'était ni seul, ni prépondérant, ni même adulte, serait une Angleterre parallèle à celle connue par Tolkien.

Ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre. Une terre à la fois imaginaire et perdue.

" Alors Lindo dit: "que narreront les contes ce soir ? Narreront-ils les Grandes Terres, et les demeures des Hommes ; les Valar et Valinor; l'Ouest et ses mystères, l'Est et sa gloire, le Sud et ses contrées sauvages qui n'ont jamais été foulées; le Nord et son pouvoir et sa force; ou bien cette île et son peuple; ou les jours anciens de Kôr où demeura auparavant notre peuple ?"

La Terre du Milieu connue par la trilogie du Seigneur des Anneaux ou par le Silmarillon s'est tout à fait éloignée de cette conception première, et il est impossible, désormais, d'établir un parallèle avec l'Angleterre. D'ailleurs, cette dernière est une île, alors que la Terre du Milieu est un vaste continent. Les îles originelles (in "Book of lost Tales ") ont disparu, sinon dans les légendes que se racontent les personnages, pour laisser place à des terres typiquement continentales, comme la Lorien ou le Mordor pour lesquels nous avons des cartes précises. Elles sont la lointaine histoire, les mythes, les Mondes Perdus des habitants de la Terre du Milieu. Ainsi, il n'y a pas de cartes sérieuses et exploitables de Tol Eressea ou d'Aman, des terres originelles dont parlent les légendes elfiques. Tolkien n'a laissé que des schémas confus et illisibles, parfois même contradictoires.

b- A partir du Silmarillon: l'Europe et l'Afrique du Nord

Pourtant, et cela est confirmé par Tolkien lui-même dans ses lettres, s'il faut établir un parallèle entre son monde imaginaire et le nôtre, il faut laisser de côté l'Angleterre et les îles britanniques pour s'intéresser à l'Europe et à ses environs. La comparaison reste hasardeuse, mais Umbar, sur la carte que l'on a dans le Seigneur des Anneaux, ressemble vraiment beaucoup à la côte africaine, et la mer d'Helcar peut, dans certains passages, évoquer la Méditerranée, bien qu'elle disparaisse dans les récits les plus tardifs (à partir du SDA). Par ailleurs, si j'ai signalé plus haut une forte inspiration d'origine scandinave dans les textes anciens de Tolkien, il n'en est plus de même pour la suite, et notamment au niveau de la sémantique. Alors qu'il fabriquait ses histoires en puisant dans les mythes scandinaves, et ses noms dans l'anglais ancien ou le vieux nordique, il élabore par la suite de véritables langages qui sont de nos jours affaire de spécialistes au même titre que les langues "historiques": ainsi, les langues des Nains et des Numenoréens sont typologiquement des langues de type sémitique, du genre de l'Arabe ou de l'Hébreu, ce qui conforte l'idée Européenne et Africaine de la localisation d'origine.

Par ailleurs, je signale que les plus célèbres de ces langues "inventées", le quenya et le sindarin, langues elfiques, sont typologiquement plus proches du gallois ( ce qui nous ramène à la Grande Marche vers l'Ouest qui aurait amené les Elfes archaïques en Arda..)

c- Ce qu'en a dit Tolkien :

" A kind of legendary and history of a " forgotten epoch "

L'oeuvre de JRRT, telle que nous la connaissons, est celle de toute une vie. Lorsque l'on se pense sur la multitude d'écrits et autres études parues sur lui et sur son monde, ou à la lecture de son abondante correspondance, on peut être étourdi par les nombreuses incohérences qui apparaissent quant à sa conceptualisation d'Arda. C'est qu'il a écrit, réécrit, réinventé, affiné sans cesse cet univers, et la (les) mythologie(s) qui lui est attachée. Il y a d'énormes écarts en l'Histoire de la Terre du Milieu, relatée dans les années 1915-20, et celle que nous connaissons mieux, des années 1940 et suivantes (le Silmarillon et la trilogie du Seigneur des Anneaux ont bénéficié de cette lente et rigoureuse maturation, mais leur incroyable succès en librairie a aussi contraint l'auteur à se pencher sur des aspects qu'il n'avait peut-être pas consciemment explorés, à l'occasion des nombreuses lettres échangées avec ses admirateurs, des colloques et autres articles de journaux parlant de lui.).

L'engouement d'un public anxieux de se plonger davantage dans ce monde après avoir fermé la dernière page donne ainsi une dimension exceptionnelle supplémentaire à l'oeuvre de Tolkien. Ainsi, cette question des origines et des correspondances de la Terre du Milieu avec l'Angleterre et/ou la Scandinavie trouve plusieurs réponses paradoxales dans le courrier de l'auteur, suivant l'année de leur rédaction, comme si, à l'occasion du problème soulevé, Tolkien y avait réfléchi après coup et fabriqué sur pièce sa propre théorie. Parfois, il l'a admise et même, s'en est expliqué (lettre 211 datée du 14 oct. 1958), mais sur la fin, comme dans la lettre à Charlotte et Christopher Plimmer il affirme, après un exposé un peu compliqué, qu'on pourrait seulement imaginer une origine spirituelle de la Terre du Milieu en Europe du Nord, mais que ce schémas reste pour lui inapplicable, tant géographiquement que spirituellement. Pour ce qui est de la sémantique et de la linguistique, il dit qu'il regrette d'avoir été obligé d'utiliser certaines terminologies d'origine nordique (scandinave et/ou germanique) comme le mot elfe ou orc. Sa propre vision attachée à ces vocables correspondait en réalité à un folklore ancien et traditionnel, souvent sans équivalent en anglais, ou déformé. Pour les Elfes, par exemple, il dit qu'il était conscient - et le regrettait pour la compréhension de son monde tel qu'il l'a pensé - que ce terme (et les images associées) ait été détourné et déformé dans l'imaginaire des gens (des Anglais) par des auteurs tels que Shakespeare.

Pour Tolkien, finalement, la Terre du Milieu n'est pas un monde imaginaire. Il s'en explique dans plusieurs lettres, mais je n'évoquerais ici que celle qu'il écrivit en 1956 (n°183, p239) :

Le nom (de la Terre du Milieu) est la forme modernisée (apparue au XIII7 s et encore en usage) de " Midden-Erd " ou " Middel-Erd ", un nom ancien pour l'oikoumené, le lieu soumis aux Hommes, objectivement le monde réel, utilisé de façon spécifique en opposition aux mondes imaginaires (comme celui des Fées) ou aux mondes invisibles (comme le Paradis ou l'Enfer). Le théâtre de mon récit est cette terre, celle sur laquelle nous vivons maintenant, mais la période historique est imaginaire ".

Ainsi, et il le répète dans une autre lettre, il préfère utiliser notre terre (géographie) dans un temps imaginaire plutôt que dans créer une physiquement ou de déplacer son récit sur une autre planète. Il souligne d'ailleurs à l'occasion sa défiance face aux fictions se référant aux autres planètes et aux aliens,, bien qu'acceptant un parallèle créatif entre sa motivation et celle des auteurs de SF. Pour Tolkien, il est simplement fascinant de se retrouver dans un lieu familier si celui-ci est sublimé par " l'enchantement de la distance du Temps "

- III- les 3 visions du mythe du "monde perdu" chez Tolkien

TOL ERESSEA:

Ses falaises sont "emplies d'un bavardage et d'une odeur de poisson, et de grands conclaves se tiennent sur leurs escarpements " (allusion aux nombreux oiseaux marins qui y ont élu domicile une fois qu'Ossë a ancré les îles au fond de la mer). Tol Eressea est son nom dans le langage des fées (=elfes), mais elle porte aussi bien le nom de Dor Faidwen dans celle des gnomes, ce qui signifierait "le Pays de la Libération". Elle se trouve très à l'ouest, après son long périple. Son histoire est notamment racontée dans le premier des "Contes Perdus", déjà évoqué, "la Chaumière du Jeu Perdu  ".

Revenons à Eriol, puisque c'est par les récits qu'il récolte que nous connaissons Tol Eressea. Marin, il est fasciné par la mer, et les horizons inconnus. Il ne tient pas en place. Il entreprend un nouveau voyage, toujours plus à l'ouest, et parvient sur Tol Eressea, qu'il nomme " Se Uncùtha Holm": "l'île inconnue" en vieil anglais. Les notes laissées par Tolkien complètent les contes récoltés par le marin, et confortent la théorie géographique des origines britanniques des terres qu'il a imaginées. Ainsi, le nom que s'est donné Eriol (il est dit aussi que ce sont les gnomes qui le nommèrent ainsi): ANGOL, "du même nom que les régions de sa demeure ".

Or, Adam Tolkien pense que son père voulait parler de la migration des premiers Anglais depuis leurs terres originelles, en Scandinavie, vers les îles britanniques. En vieil anglais, angel ou angul est le nom d'une région danoise se situant entre le fjord de Flensburg et la rivière Schlei, au sud du Danemark actuel. Il changera encore de nom pour devenir Aelfwine, " l'ami des elfes", et dans un conte ultérieur du même nom, il est vraiment désigné comme étant un anglais de la période anglo-saxonne naviguant vers l'ouest par l'Océan Atlantique et découvrant Tol Eressea. Ainsi, on peut supposer que l'extraordinaire expédition que fut l'arrachage des fondations sous-marines de l'île Tol Eressea et son long voyage vers l'ouest l'ont conduite... à l'emplacement géographique de l'Angleterre que nous connaissons (de la Scandinavie à l'Angleterre).

Pourtant, le problème n'est pas résolu, car en terres elfiques rien n'est simple, et les clefs verrouillent davantage qu'elles n'ouvrent les portes ! Ainsi, si Tolkien dit que le marin Eriol est anglais cela ne signifie pas qu'il soit un "Anglais d'Angleterre", c'est à dire un habitant de l'île tel(le) que nous le comprenons. Il dit aussi que la terre qu'il découvre, Tol Eressea, est, ou plutôt sera l'Angleterre que nous connaissons. Ainsi, la cité qui se trouve au centre de l'île Tol Eressea, Koromas (ou Kortirion) deviendrait la ville anglaise Warwick. De nombreuses correspondances jalonnent les contes, volontairement semées par Tolkien:

Kortirion = Warwick (+ concordance étymologique Kor- et War-)

Alalminor', le Pays des Ormes = le comté du Warwickshire

Tavrobel = le village de Great Haywood (Comté du Staffordshire)

VALINOR, au-delà de l'océan de l'Ouest.

En son centre se trouve la cité de Kôr, en souvenir de laquelle fét érigée celle de Kortirion à Tol Eressea.

"Très belle fut Kôr et les fées l'aimèrent, et elle devint riche de chanson et de poésie et de la lumière des rires; mais en un temps la grande Sortie de l'Avant se fit, et les fées eussent fait renaître le Soleil Magique de Valinor, n'eussent été la trahison et la faiblesse des coeurs des Hommes. Ainsi est-il que le Soleil Magique est mort et l'Ile Solitaire retirée jusqu'aux confins des Grandes Terres, et les fées sont éparpillées de par toutes les larges voies hostiles du monde; et maintenant les Hommes demeurent même sur cette île pâlie, et ne se soucient pas ou ne savent rien de ses jours anciens. Pourtant toujours se trouve-t-il quelques uns des Eldar et des Noldoli des temps anciens qui s'attardent encore sur l'île, et l'on entend leurs chants autour des rives du pays qui fut auparavant l'une des plus belles demeures du peuple immortel."

Après avoir dissimulé Valinor aux yeux des mortels (les Hommes principalement), les elfes valar Orom' et Lorien reçurent l'ordre de concevoir des chemins secrets et magiques pouvant conduire jusqu'à leur monde perdu. Ces chemins sont évoqués à plusieurs reprises dans les Contes, mais surtout dans "la Chaumière du jeu Perdu " et dans le poème "Toi & Moi " (1915), préfigurant les poèmes "Les Aventures de Tom Bombadil " (1962). La version la plus courante est celle des Chemins des Rêves, conçus par Lorien, et par lesquels les "enfants des pères des pères des Hommes" vinrent à Valinor pendant leur sommeil. " Lorien tissa une voie de magie délicate, et elle alla par des chemins tortueux très secrets depuis les régions de l'Est et toutes les vastes et sauvages contrées du monde même jusqu'aux murs de Kôr, et elle passa par la Chaumière des Enfants de la Terre et de là descendit le sentier des Ormes Murmurants jusqu'à ce qu'elle eét atteint la mer. Mais elle jeta des ponts par-dessus les mers sombres et tous les détroits, avec de fines passerelles qui reposèrent sur l'air et luisant de gris comme si elles étaient des brumes soyeuses éclairées par une lune maigre, ou des vapeurs de perle; pourtant, mis à part les Valar et les Elfes, aucun Homme n'a de ses yeux contemplé cette voie sauf lors des doux sommeils dans la jeunesse de son coeur. La plus longue de toutes les voies est-elle, et ils sont rares à jamais atteindre sa fin, tant de pays et d'endroits merveilleux de séduction et de ravissement traverse-t-elle avant de jamais atteindre Elfinesse, pourtant est-elle lisse sous les pieds, et ne se fatigue jamais celui qui emprunte ce chemin." Dans le même texte, on apprend que le Valar Orom' fabrique une autre voie, aérienne celle-ci: l'Arc-en-Ciel. Nùmenor: une Atlantide de plus...

Dans plusieurs lettres, Tolkien assimila lui-même Nùmenor, dont la destruction conduisit Valinor et Tol Eressea à se couper du monde physique (et mortel: donc le nôtre ou un monde proche du nôtre) à Atlantide. Rappel des faits: Avant la chute et la destruction de Nùmenor ("The Great Isle of Westernesse), l'île Tol Eressea (l'ancien "Paradis" elfique) ainsi que Valinor, le royaume des Valar étaient alors accessibles aux mortels par voie navigable, bien que le périple fét réputé dangereux. Après la Rébellion des Nùmenoréens, les Rois des Hommes qui résidaient dans un pays plus à l'Ouest que toutes les autres terres mortelles, entreprirent d'envahir Eressea et Valinor. Une guerre terrible s'engagea alors au terme de laquelle Nùmenor fut détruite, Tol Eressea et Valinor littéralement arrachées d'Arda et du monde accessible: la route de l'Ouest resta ouverte, mais elle ne menait désormais les mortels nulle part sinon à leur point de départ. Dans une lettre de 1971, Tolkien ajoute qu'Aman (c'est à dire désormais Tol Eressea et Valinor) pouvait toutefois être atteinte par certains Elfes Valar ("The angelic immortals (...) regents under gods ") mais aussi par des êtres possédant des pouvoirs de même nature bien que moins importants. Ainsi en irait-il d'Olorin (= Gandalf), qui n'aurait besoin d'aucun moyen de transport pour s'y transporter, Aman n'appartenant plus au monde physique. Tolkien suggère dans la même lettre que des mortels plus simples, tels que le Hobbit Frodon et ses compagnons de route, pourrait y séjourner pour une durée limitée, ce qui se vérifie dans le Seigneur des Anneaux..

Dans ses lettres, Tolkien fait d'ailleurs plusieurs fois allusion à un cauchemar récurrent qu'il aurait exorcisé en écrivant la nouvelle "La Chute de Numenor" (in "Les Contes Perdus"), et qu'il acrédite à ce qu'il appelle son "Complexe Atlantide":

Lettre 257 ("Letters of JRR Tolkien", éd. HarperCollins, p347)

"(...) Another ingredient, not before mentioned, also came into operation in my need to provide a great fonction for strider-Aragorn. What I might call my Atlantis-haunting. This legend or myth or dim memory of some ancient history has always troubled me . In sleep I had the dreadful dream of the ineluctable wave, either coming out of the quiet sea, or coming in towering over the green inlands. It still occurs occasionally, though now exorcized by writing about it (...). I used to draw it or write bad poems about it. When C.S. Lewis and I tossed up, and he was to write on space-travl and I on time-travel, I began an abortive book of time-travel of which the end was to be the presence of my hero i n the drowning of Atlantis. This was to be called " Numenor The Land in the West.""

Lettre 163 ("Letters of JRR Tolkien", éd. HarperCollins, p213)

"(...) and the deep response of legends (for lack of a better word) that I have what I could call the North-Western tempes and temperature. Inany case if you want to write a tale of this sort you must consult your roots, and a man of the North West of the Old World will set his heart and the action of his tale in an imaginary world of that air, and that situation : with the Shoreless Sea of his innumerable ancestors to the West, and the endless lands (...) to the East (...) I say this about the "heart" , for I have what some might call an Atlantis complex. Possibly inherited, though my parents died too young for me to know such thing about them, and too young to transfer such thing by words. (...)I mean the terrible recurrent dream (beginning with memory) of the Great Wave, towering up, and coming in ineluctably over the trees and green fields. (I bequeathed it it to Faramir) I don\rquote t think I have had it since I wrote the"Drownfall of Numenor" as the last of the legends of the first and second Age."

D'Aman, on ne sait que peu de chose, ce qui est notable dans l'Oeuvre de JRRT. On ne la connaît que par des légendes, lesquelles sont la plupart du temps nées d'esprits humains ou de Sindar n'ayant jamais quitté les Terres du Milieu. Aman est donc un monde perdu pour un monde perdu (imaginaire) pour nous: Arda. Pourtant, comme l'île où repose le roi Arthur en attendant de revenir parmi nous, la légende suggère à défaut de le promettre, qu'elle sera de nouveau accessible pour nous un jour. Quant à Nùmenor, à l'instar d'Atlantide, elle est perdue à jamais, détruite. Anéantie. Seule la mémoire, la connaissance et la transmission de son histoire et des raisons de sa chute lui accordent de se survivre par le mythe. Plus qu'un Monde Perdu, Tolkien nous répète à l'infini l'histoire fondatrice et universelle des peuples: Aman est le Paradis Perdu, et Nùmenor est à la fois le Pêché Originel, Atlantide, Mé et tous les autres Mondes Perdus...

© Claire PANIER septembre 1998

à suivre: " La place tenue par les arts dans l'oeuvre de Tolkien" " La place tenue par la religion dans l'oeuvre de Tolkien" " La place de la science, dont l'astronomie, dans l'oeuvre de Tolkien